Travail de la voix
Travail de la voix
Travail du texte
Ma pédagogie de la voix parlée prend sa source dans la technique vocale anglaise : diction souple et affinée, plus gustative que gymnique, sans surarticulation ; recherche d’un maximum de souplesse et de plasticité dans l’étendue vocale ; exploration des différentes tonalités, suivant les registres expressifs, et en lien avec l’imagination, l’espace intérieur et l’espace de jeu.
Cette souplesse et cette disponibilité vocales requièrent de bons appuis, une respiration ancrée, une mobilisation musculaire profonde, qui permettent de conserver un état de détente et d’ouverture de tout le haut du corps, et ce, jusque dans les moments de grande intensité vocale.
Pour travailler cette respiration et cette mobilisation, ainsi que le bon placement de la voix, j’utilise également la technique de gymnastique respiratoire Sandra-Romond, telle que l’enseigne aujourd’hui Catherine Rétoré au sein de l’ERSR.
Ma pédagogie de la voix parlée prend sa source dans la technique vocale anglaise : diction souple et affinée, plus gustative que gymnique, sans surarticulation ; recherche d’un maximum de souplesse et de plasticité dans l’étendue vocale ; exploration des différentes tonalités, suivant les registres expressifs, et en lien avec l’imagination, l’espace intérieur et l’espace de jeu.
Cette souplesse et cette disponibilité vocales requièrent de bons appuis, une respiration ancrée, une mobilisation musculaire profonde, qui permettent de conserver un état de détente et d’ouverture de tout le haut du corps, et ce, jusque dans les moments de grande intensité vocale.
Pour travailler cette respiration et cette mobilisation, ainsi que le bon placement de la voix, j’utilise également la technique de gymnastique respiratoire Sandra-Romond, telle que l’enseigne aujourd’hui Catherine Rétoré au sein de l’ERSR.
C’est à sa vitesse de réaction aux mots que l’acteur se révèle ; c’est à sa connaissance, à sa maîtrise de la diversité des formes verbales qu’il s’accomplit .
Michel Bernardy, Le Jeu Verbal
Il y a un défi dans le passage d’un texte écrit en deux dimensions sur une page, à une parole vivante qui prend sa dimension dans l’espace tout en s’enracinant dans le corps et l’imaginaire de l’acteur.
La parole doit être action.
Pour que la parole agisse sur le partenaire et sur l’imagination du spectateur ou de l’auditeur, elle doit naitre d’impulsions successives dans le corps et l’esprit de celui qui le dit, qu’il le lise ou qu’il l’ait appris par cœur.
En abordant les textes avec les outils que Michel Bernardy a façonnés par son étude des grammairiens et sa fréquentation passionnée des poètes, nous pouvons suivre vocalement chaque auteur au plus près de sa pensée, au plus près ses audaces stylistiques et de ses inventions langagières, sans surcharge inutile, sans intervention maladroite.
Les lignes de force sont mises à jour, on prend la mesure de la dynamique du texte, on apprend à jouer avec sa structure. Au fil des linéarités ou des rebonds de la formulation, chaque phrase devient un événement, chaque silence devient vibrant… le texte, alors, se révèle et nous révèle !
Travail du texte
C’est à sa vitesse de réaction aux mots que l’acteur se révèle ; c’est à sa connaissance, à sa maîtrise de la diversité des formes verbales qu’il s’accomplit .
Michel Bernardy, Le Jeu Verbal
Il y a un défi dans le passage d’un texte écrit en deux dimensions sur une page, à une parole vivante qui prend sa dimension dans l’espace tout en s’enracinant dans le corps et l’imaginaire de l’acteur.
La parole doit être action.
Pour que la parole agisse sur le partenaire et sur l’imagination du spectateur ou de l’auditeur, elle doit naitre d’impulsions successives dans le corps et l’esprit de celui qui le dit, qu’il le lise ou qu’il l’ait appris par cœur.
En abordant les textes avec les outils que Michel Bernardy a façonnés par son étude des grammairiens et sa fréquentation passionnée des poètes, nous pouvons suivre vocalement chaque auteur au plus près de sa pensée, au plus près ses audaces stylistiques et de ses inventions langagières, sans surcharge inutile, sans intervention maladroite.
Les lignes de force sont mises à jour, on prend la mesure de la dynamique du texte, on apprend à jouer avec sa structure. Au fil des linéarités ou des rebonds de la formulation, chaque phrase devient un événement, chaque silence devient vibrant… le texte, alors, se révèle et nous révèle !
Les règles classiques du vers français – presque impossible à retenir comme consignes, difficiles à observer sans niaiseries, le plus d’art se dépensant à leur satisfaire, leur netteté permettant de juger sans oreille, sans poésie, les poètes ; règles conventionnelles ; de sociétés ; très propres à rendre ridicule, à soumettre l’homme qui chante à l’homme qui sait compter jusqu’à douze.
Valéry, Cahiers. Poésie.
Entretien avec Valérie Bezançon
Quel est ton parcours de comédienne ?
J’ai commencé jeune, dans une troupe liée au conservatoire de Mulhouse. Après mon bac, j’ai passé une année au cours Florent, qui a débouché sur un premier engagement au Théâtre National de Marseille, dans une adaptation d’un roman de Georges Bataille. Mais ma formation était encore très incomplète. Je me suis présentée à l’ENSATT, puis au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, où j’ai eu Denise Bonal, Pierre Vial et Jean-Pierre Vincent comme professeurs d’interprétation. Bernard Dort enseignait la dramaturgie, Mario Gonzales le jeu masqué, Jean-Pierre Romond, la respiration…Mais c’est l’enseignement de Michel Bernardy, professeur de langage, qui s’est révélé déterminant pour moi.
Pendant ces trois années de Conservatoire, je jouais dans la Compagnie Renaud-Barrault. On répétait l’après-midi, on jouait le soir, et j’étais en cours tous les matins. C’était très formateur.
Après ma sortie du Conservatoire, j’ai joué plusieurs grands rôles du répertoire classique (Juliette, la Reine dans Ruy Blas, Suzanne dans le Mariage de Figaro, le Chevalier dans La Fausse Suivante…) qui ont approfondi mon rapport à la langue.
Autre expérience marquante, mon travail avec la Compagnie Les Affranchis, sur plusieurs spectacles à partir des nouvelles de Tchekhov. Cinq ans de créations et de tournée avec un quartette de jazz qui nous accompagnait en scène. J’ai pris conscience, pendant cette aventure, de l’importance du rythme et de la musicalité dans mon travail de la langue.
J’ai développé ensuite ce travail sur les textes non dramatiques, en créant des spectacle en solo sur des textes de Virginia Woolf, Fernando Pessoa, James Joyce, Marcel Proust…
Comment es-tu venue à la pédagogie ?
Quand je jouais en compagnie, j’ai été amenée à faire de la direction d’acteurs et à donner des cours. Et ça m’a passionné. Les outils que m’avait transmis Michel Bernardy, et qui m’avaient été si utiles comme comédienne, se sont à nouveau imposés à moi. Je me suis remise au travail pour pouvoir transmettre ces outils à mon tour, notamment ceux qui permettent d’aborder les textes versifiés, car je rencontrais un vrai besoin chez les acteurs que je côtoyais.
Grâce à une amie, je suis rentrée en contact avec Jean-Claude Berutti, qui dirigeait à ce moment-là la Comédie de Saint-Etienne, et qui m’a confié les étudiants de l’Ecole pour le travail sur l’alexandrin. Elsa Rooke , metteuse en scène et musicienne, s’occupait alors de la direction pédagogique, et ciselait des programmes d’une grande pertinence. Ce furent des années très riches. Je suis entrée ensuite dans l’équipe enseignante de l’ESAD où je transmets depuis bientôt dix ans les techniques de voix parlée et du phrasé du texte, en prose ou en vers.
Quels sont les liens de ta pédagogie de la voix avec la technique vocale anglaise ?
Je gardais un souvenir enthousiaste du travail sur Shakespeare auquel Michel Bernardy nous avait initié en 3ème année, travail inspiré de la technique vocale anglaise, que lui-même avait pratiquée avec le metteur en scène Michel Saint-Denis. Je n’avais pas pu prolonger cette pratique avec les metteurs en scène que j’avais rencontrés. Des années plus tard, j’ai trouvé des échos de ce travail vocal autour de Shakespeare dans le descriptif d’un stage que Nadine George, du Voice Studio International, organisait en France. Grâce à elle, j’ai renoué avec ce travail d’ancrage, et d’ouverture de l’étendue vocale, qui associe le féminin et le masculin, du plus aigu au plus grave, et permet d’explorer, par le jeu vocal, des zones inconnues en soi. Nadine a construit sa méthode en mêlant cette base anglaise à l’approche de Roy Hart.
A cette même époque, j’ai appris que Declan Donnellan cherchait un coach vocal pendant ses répétitions d’Andromaque de Racine. Je me suis lancée. Declan a été très accueillant (même s’il m’a tout de suite prévenue « Ne touchez pas au vers ! »). Plus tard, il a refait appel à moi pour ses autres mises en scène en France, Ubu Roi d’Alfred Jarry, et Péricles, Prince de Tyr, de Shakespeare.
J’ai ensuite retravaillé avec Nadine George, et étudié les travaux de Cicely Berry et de de Patsy Rodenburg, deux « voice teachers » britanniques qui font des liens très précis avec le travail du texte et de l’interprétation.
Depuis que j’enseigne à l’ESAD, j’utilise aussi les techniques de respiration et de phonation qu’enseigne Catherine Rétoré.
Comment se passe ton travail avec les acteurs et les metteurs en scène français ?
Pour les britanniques, sur les productions d’une certaine importance, avoir une personne qui s’occupe du mouvement, et une autre pour la voix et le travail du texte, relève de l’évidence. En France, les metteurs en scène n’ont pas cette culture, ils peuvent craindre une forme d’intrusion dans leur travail. Ce n’est peut-être pas un hasard si ce sont des femmes (Macha Makeïeff pour Trissotin ou Les Femmes savantes, puis Claudia Stavisky pour La Place royale) qui ont été les premières, en dehors de Declan Donnellan, à m’associer à leurs créations.
Mais les choses bougent petit à petit. Les acteurs qui font appel à moi pour travailler la voix ou le texte l’assument davantage. Ils viennent pour préparer un rôle, remédier à des fragilités techniques, ou élargir leur expression. Car ils sont souvent seuls face à des questions de phrasé, de gestion de l’intensité du jeu ou de fatigue vocale. Une bonne préparation en amont des répétitions (ce que je privilégie toujours !) donne à l’acteur une forme de stabilité, indispensable pour prendre des risques.
Mais il est important qu’un acteur puisse s’entrainer et se former en dehors des périodes de répétition ou de jeu. Il est alors plus disponible pour questionner sa pratique, ses choix, et considérer calmement son propre chantier.
C’est pour répondre à ce besoin que Sava Lolov et moi avons créé l’Ecole du Verbe.
Comment s’est nouée ta collaboration avec Sava Lolov ?
Nous nous sommes rencontrés en 2011, au moment de la réédition par l’Age d’Homme du livre de Michel Bernardy, Le Jeu Verbal. Nous devions lire en public des extraits du livre, et nous avons été frappés par notre géméllité dans le travail du texte. Ensemble, nous avons créé plusieurs spectacles basés sur ce travail de la langue. D’abord Shakespeare dans la traductions de Michel Bernardy (Les Rois du jour et de la nuit), puis Racine (Andromaque et le dieu caché), et Molière (L’Esprit de Madeleine)… Cette collaboration de jeu, que nous continuons chaque fois que c’est possible, y compris sous forme de laboratoire, est venue prolonger et enrichir le travail que je poursuivais en solo, et qui me permettait de faire dialoguer l’actrice et la pédagogue.
Nous avons eu aussi envie d’enseigner ensemble, pour transmettre ce travail sur la langue que nous tenons de Michel Bernardy. Nous avons donc créé l’Ecole du Verbe où peuvent venir travailler ceux qui souhaitent acquérir une meilleure maîtrise vocale et verbale, en s’entrainant régulièrement. Nous souhaitons aussi former des personnes qui seront capables de transmettre ce travail à leur tour.
Quels sont vos liens avec l’Ecole de la Respiration Sandra-Romond ?
Catherine Rétoré a repris l’enseignement que dispensait Jean-Pierre Romond au Conservatoire, et que Sava et moi avions suivi tous les deux. Lui n’a jamais cessé de pratiquer. Moi, c’est à l’ESAD que j’ai renoué avec la gymnastique respiratoire, en y rencontrant Catherine.
Lors de « semaines techniques » initiées par notre directeur, Serge Tranvouez, Valérie Onnis (professeur de danse), Catherine et moi, enseignons ensemble pour permettre aux élèves de faire des liens entre nos trois pratiques, mais aussi entre ces approches techniques et le jeu, ce qui est toujours si difficile à réaliser dans la formation de l’acteur.
Dans le même esprit, nous enseignons ensemble à l’Ecole supérieure d’acteurs des Teintureries à Lausanne, à l’invitation de Nathalie Lannuzel.
Enfin, Catherine nous invite, Sava et moi, à intervenir dans les stages de formation professionnelle qu’elle organise sous l’égide de l’ERSR.
L’objectif est, là encore, d’aider les comédiens, musiciens, chanteurs, à faire le lien entre leur technique respiratoire et leur pratique artistique.
Car tout est interdépendant dans le jeu : le corps, l’espace, la respiration, la pensée, la parole…